Je
suis un pays
Je
suis d’un pays blessé par son histoire
Un
pays de mornes rouges
Un
pays fonds-massacres
Un
pays qui trébuche après chaque cyclone
Et
se redresse sur ses jambes de palmier
Un
pays qui se souvient
Et
circule dans le tunnel de sa mémoire
Je
suis d’un pays coléreux
Et
qui réclame justice et respect
Pour
sa terre empoisonnée
Pour
sa tête qui bascule dans la consommation
Un
pays qui vit hors de son nid
Et
qui importe ses jours à la télévision
Je
suis d’un pays que déguise un carnaval hors-saison
Un
pays qui marche en vain
Qui
tourne en vain dans les ronds-points
Du
désespoir
Un
pays qui creuse en vain les rides du ciel
Un
pays qui vit en vain
Et
tend la main aux guichets des fausses bontés
Je
suis d’un pays de paillettes en haillons
et
de joies inutiles
Un
pays où la terre s’amenuise
Où
la mer s’assèche
Où
les bananiers portent le deuil des vents
Je
viens d’un pays qui danse sur sa peur
Un
pays qui s’est trompé d’abondance
Un
pays-container
Un
pays porte-misère
Un
pays cache-misère
Un
pays qui titube dans la mangrove de la modernité
Mais
un pays qui se bat
Et
se débat
Un
pays qu’on abat
Et
qui crie Guadeloupe
Pour
se donner la force
D’avoir
un lendemain
Ernest
Pépin
Faugas/Lamentin
18 novembre 2012
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