Les fêtes de Noël
de ma mère
Je ne sais
pourquoi, mais j’ai remarqué que nos parents ne sont guère prolixes dès
qu’il
s’agit de raconter leurs souvenirs d’enfance. Est-ce de la pudeur, de
la
modestie ou autre chose qui est responsable de leur mutisme, je ne sais
pas,
mais en tout cas je fouille et je les questionne
dès que le besoin s’en fait sentir ou
quand la rédaction d’un article le demande.
En cette
période de Noël, quoi de plus normal que
de les interroger afin de connaître la manière
dont ils fêtaient la
Noël, la manière dont ils appréhendaient cette période, que l’on devine
dans
les années 50 et début 60 comme un moment de grande piété et de ferveur
religieuse, mais aussi un moment grivois, car toute cette proximité,
cette
convivialité, l’alcool aidant et entre deux ritournelles nos parents
devaient
pour les plus « libertins » s’en donner à cœur joie derrière la case ou
dans
les bois.
Mais Noël est
la fête des enfants, par conséquent Noël est asexué, il n’y a pas de
sexe en
cette période de l’année où le petit
Jésus naquit dans une grotte de Bethléem.
Alors Comment
se déroulait le Noël de ma mère qui
à l’époque vivait à Grosse Roche – Trénelle – Citron.
Elle en dit peu de chose. Pour réaliser son sapin de
Noël, sa
mère donc ma grand-mère utilisait une branche de filao (pin australien) , qu’elle décorait, que les enfants ornaient avec du papier
de
couleur, ce même papier qui sert à faire les cerfs-volant lors de leur
saison.
Le filao
festonné de papier crépon de différentes couleurs se trouvait enluminé de guirlandes multicolores
et éclairé par un assemblage
artisanal de petites ampoules, celles servant dans
les lampes de poche
reliées à un accu de voiture, car ces mornes à l’époque n’étaient pas
électrifiés, et quand bien même ils l’eurent été, le coût eut été
prohibitif
pour ces « malheureux », c’est ainsi qu’ils se dénommaient.
Au pied du
filao trônaient des poupées de chiffons que ma grand-mère
confectionnait pour
ses filles, des jouets fabriqués par eux-mêmes.
En écoutant ma
mère, je remarquais que son œil pétillait lorsqu’elle me parlait des
préparations culinaires, qui ma foi ont peu évolué au cours du temps.
Le
cochon-planche élevé dans l’arrière-cour de la case en bois pour ce jour de
Noël, le boudin de Noël, le pâté de
cochon, le pois d’Angole qui n’était
consommé que ce jour,
l’igname de Noël, yanm cha cha ou sasa, une igname sauvage qu’elles
allaient déterrer dans les bois, la coupe à fruits contenant les 13
fruits
: les oranges, les mandarines, les
icaques entre autres, la réalisation des alcools : le shrub, l’anisette…
Puis le soir ma
mère accompagnait sa mère de maison en maison chanter des cantiques de
Noël.
Evariste Zephyrin
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