Un
Noël à Cuba
Cuba fut
dès la découverte sous tutelle espagnole et donc les traditions noèlesques cubaines
ont emprunté au patrimoine religieux et culturel des
Espagnols.
Mais nous relevons
trois phases dans ce processus religieux et d'acculturation.
Dans un premier temps,
les coutumes sont similaires aux peuples d'Amérique Latine
:
l’envoi de cartes de vœux souhaitant, santé, bonheur et
paix.
Noël se passait en
famille et amis, décoration des fenêtres, des maisons, arbre de Noël et
l’échange des cadeaux.
Pour le dîner le
porcelet, le manioc, les ignames, le riz, les haricots noirs, les
fricassés de
poulets et de congre, le tout accompagné de vin, de rhum, de
cidre, pour
le dessert les nougats et enfin après le repas assister à la messe de
minuit. Nous avions un Noël tout ce qu’il y avait de
conventionnel :
« Dans tous les foyers, on
prépare la
crèche de Noël et cela dès les premiers jours de décembre. C'est
même
toute une pièce, le salon ou une chambre à coucher qui sert à loger la
crèche. On y voit la Vierge, Joseph et l'Enfant-Jésus qui ont le
premier
rang. Mais tout le village y est représenté : église, école,
maisons, fermes, animaux (chiens, chats, poules, cochons,...) parcs,
jardins de
fleurs, ponts, ruisseaux...
D'autres crèches de
Noël sont en carton ou en bois, avec des personnages de grandeur
nature à
l'extérieur des maisons, soit en avant sur les parterres ou sur le toit
des
maisons. Ce sont ces crèches extérieures qui deviendront
les
« Posadas » (maisons de pension pour voyageurs). C'est
devant
ces crèches que les gens iront faire leur neuvaine préparatoire à la
fête de
Noël. Ils se rassemblent et viennent en foule dans les rues en
faisant
entendre les « maracas », les castagnettes, les clochettes et
en
chantant tout le long du trajet, des chants à L'Enfant-Jésus. A la
« Posadas », on récite le chapelet, on chante et de nouveau
on s'en
retourne aux sons joyeux des castagnettes et des « maracas »
Les enfants ne
reçoivent pas leurs cadeaux à Noël, mais seulement au Jour des Rois, le
6
janvier. Selon la légende transmise de père en fils aux enfants
cubains,
ce sont les trois Rois Mages venant de l'oriente (Orient) qui apportent
les
cadeaux aux enfants. (Oriente: à l'extrémité de l'île de
Cuba, il y
a une province très montagneuse portant ce nom).
Fait
typique:
Dans la nuit du 31
décembre, les gens se réunissent dans les maisons et aux douze coups de
minuit,
c'est la coutume de s'empresser de manger douze raisins. Si on y
réussit,
on est assuré de bonheur et de prospérité durant toute l'année.
Ensuite,
vient le repas de fête dans lequel le mets principal est un porc qui a
été
préparé et grillé sur broche durant la journée.»
Mais la manière de
commémorer Noël va changer
lorsque Fidel Castro prend le pouvoir en 1959. Les fêtes
religieuses sont
suspendues, puis en 1969 sont officiellement supprimées, les vacances
de
Noël supprimées elles aussi. Mais les chrétiens continuent dans un cadre
domestique à
adorer le Christ et à célébrer la naissance de Jésus.
Pendant 28 ans, il en sera ainsi sous le
régime socialiste de Fidel Castro, le pays sombre dans l’athéisme, ce
qui
correspond à la deuxième phase des processus sociaux-religieux des
solennités
de Noël.
Si la religion catholique
marque un vif retrait, dans la même période se voit réhabiliter la
Santéria .
Une religion afro-cubaine
proche des préoccupations du
peuple.
En 1998, avec la venue du Pape Jean-Paul
II, Noël est rétabli, de même que les religions
chrétiennes
ainsi que les vacances de Noël.
Six ans après, les Cubains ont
montré peu d’enthousiasme à célébrer les fêtes de Noël, les rues
étaient comme
d’habitude, les travailleurs ont juste
quitté plus tôt leur travail.
Quelques
familles comme par le passé ont échangé des cadeaux et dîné comme
autrefois, porcelet rôti, dinde farcie.
Il n’y a pas de père Noël à la barbe
blanche à prendre en photo avec un
enfant sur les genoux, pas de chants entonnés ici ou là, pas de
collecte
d’argent pour les œuvres caritatives, peu de cartes échangées,
les médias
n’en parlent pas.
La
figure de Noël n’apparaissait presque exclusivement dans les zones
d’ambassades
et quelques maisons de la havane, notamment dans les quartiers
historiques.
Toutefois, la tradition de rencontrer les parents
a fonctionné comme par le
passé à propos des personnes ayant la foi ou non.
Dix
ans après, les sapins de Noël refont une apparition à la
Havane : « Depuis le début du mois de décembre, nous
assistons au spectacle rare d'arbres de Noël illuminés, décorant les
magasins,
les hôtels et autres lieux publics. » Si Noël a tant de mal à
percer à
Cuba, on peut évoquer les conditions économiques peu favorables à
une
surconsommation pour cause d’embargo. Un embargo imposé par les
USA
depuis 40 ans contre Cuba. L’autre explication est hypothétique, il est
probable que Cuba connaît une déchristianisation, les
Cubains ont
trouvé dans la Santéria, la religion la plus pratiquée à Cuba,
une plus
grande proximité avec les Orishas qui démêlent leurs problèmes
quotidiens
que ce dieu rédempteur lointain promettant la résurrection après
la mort.
Evariste
Zephyrin
Céline Trudeau
m.i.c. ;!Le précurseur,
Vil XXV, no 1, janv-fév, 1968
On
a
souvent dit que les esclaves dupaient l'Église en laissant croire
qu'ils
vénéraient les saints catholiques, alors qu'en fait
derrière chaque saint, ils vénéraient un Orisha équivalent. En réalité,
selon Sixto
Gaston Agüero (1959), cité par Kali Argyriadis, dans son ouvrage
« La
Religion à La Havane » (éditions des archives contemporaines),
c'est le
mouvement inverse qui s'est produit : c'est l'Église qui a
imposé aux
esclaves les saints comme des équivalents aux Orishas. Il cite le
synode papal
du 16 septembre 1687, où l'Église ordonne aux prêtres d'ajuster les
croyances
religieuses africaines aux pratiques catholiques. Il cite également le
Bando de
Buen Gobierno y Policia qui, en 1792, oblige les Cabildos africains qui
se
vouent au culte de leurs divinités à « adorer désormais un
saint
catholique équivalent ». Il faut savoir que, contrairement à
une idée
reçue, ils étaient très réticent à évangéliser les esclaves car cela
n'était
pas rentable. En effet, cela supposait de construire une église,
d'accorder le
repos dominical et d'assurer la possibilité de manger maigre, ce qui
entraînait
des coûts jugés prohibitifs. Les Espagnols ont donc nommé cette
pratique Santería,
avec un côté péjoratif, et ses pratiquants préfèrent le terme Lukumi
(ou
Regla de Ocha).
La religion
Yoruba est dominée par un Dieu suprême Olodumare
(ou Olafin ou Olorun ou Olorian), source de l'ashé - l'énergie
spirituelle de
l'Univers -
qui a envoyé sur Terre
des émissaires, demi-dieux humains, appelés Orishás
qui sont la personnification de la Nature.
Les Orishás,
en outre, veillent pour que chaque
mortel accomplisse le destin qui lui a été destiné à sa naissance. Ceux
qui ne
l'accomplissent pas suivent le cycle des réincarnations
successives. Cette croyance est semblable à celle l'hindouisme
et du bouddhisme.
Le
« Bembe » est la musique qui
célèbre les Orishas. (source)
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