Casse-Noisette
C'est le soir de Noël,
chez Franz et Marie. Ils attendent la visite de leur oncle Drosselmeyer. Il est
horloger et leur apporte souvent de bien étranges jouets qu'il fabrique lui
même. Il raconte aussi de fabuleuses histoires.
Le voilà qui arrive ce
soir là avec trois nouveaux incroyables petits automates et, il sort de sa
poche, une sorte de poupée en bois, droit comme un petit soldat, avec une
grande bouche qui sert de casse-noisette, tout simple. Les enfants regardent
ces nouveautés et Marie prend le casse-noisette pour voir de près comment il
fonctionne. Franz veut à son tour s'en emparer. Il tire dessus, Marie ne le lâche
pas et, ce qui devait arriver arriva, le casse-noisette se casse!
Marie commence à pleurer
mais oncle Drosselmeyer s'empare vite du jouet et avec son mouchoir lui
fabrique un pansement qui lui remet la mâchoire en place. Marie le remercie
mais la maman de Marie en a assez de tout ce bruit et elle les envoie vite au
lit.
- "Allez hop Franz! Hop Marie! Allez vite vous coucher. Vous êtes trop
énervés ce soir".
Marie part sagement dans son lit et laisse sa nouvelle poupée blessée dans un
petit lit de poupée au pied du sapin.
L'oncle Drosselmeyer
vient lui souhaiter bonne nuit et lui raconte une bien curieuse histoire.
- "Tu sais Marie, ce casse-noisette n'est pas une poupée ordinaire, c'est
un jeune homme qui se cache à l'intérieur. Voilà sa véritable histoire:
Il y a longtemps un roi et une reine eurent une fille, la princesse Pirlipat,
qui était devenue très laide à cause d'un mauvais sort lancé par le roi des
souris. Les souris du château avaient cependant promis que si un jour un homme
voulait délivrer la princesse de sa laideur il le pourrait. Il lui faudrait
pour cela casser avec les dents une noix très dure et en donner son fruit à
manger à la princesse.
Bien des jeunes gens étaient venus pour tenter de délivrer la princesse de ce
mauvais coup du sort, mais, jusqu'à présent, ils s'y étaient tous cassé les
dents.
Or, un jour, mon neveu, qui avait eu vent de cette histoire, se présenta au
château. On lui apporta la fameuse noix très dure et, d'un coup de dent, d'un
seul coup de mâchoire, il l'ouvrit et en offrit le fruit à la princesse. Elle
croqua cette noix et, comme par enchantement, se transforma en une magnifique
jeune fille.
Mon neveu, ébloui par tant de beauté, recula de trois pas pour saluer la
princesse, comme il se doit. Faisant cela il marcha malencontreusement sur la
queue d'une souris venue assister à à la scène. Le roi des souris, furieux de
cet incident, lui jeta un sort et le transforma en casse-noisette en bois !
Bien sûr la princesse ne voulut pas d'un casse noisette comme mari, alors on le
chassa du château.
Voilà la triste histoire de mon neveu le casse-noisette.
Allez Marie, dors bien et fais de beaux rêves!"
L'oncle Drosselmeyer
éteignit la lumière, sortit et ferma doucement la porte; Marie commençait à
peine à s'endormir. Elle n'arrivait pas à trouver le sommeil aussi
décida-t-elle d'aller chercher son casse-noisette.
Elle se dirigeait vers le salon lorsqu'elle constata qu'il se passait des
choses un peu bizarres. Elle ne savait pas exactement ce que c'était, si
c'était elle qui rapetissait ou si tout se mettait à grandir autour d'elle.
Toujours est-il que bientôt toute une armée de souris, qui semblait descendre
du sapin de noël, vint encercler Casse-Noisette. Le petit bonhomme se leva,
appela à l'aide les soldats de bois de Franz et tous les autres jouets qui
l'entouraient. Ils se mirent en route tous ensemble contre les souris.
Le roi des souris arriva et fonça directement sur Casse-Noisette. Voyant cela
Marie attrapa son chausson, visa rapidement le roi et lança violemment sa
pantoufle sur lui. Il tomba à terre, mort ou assommé. Les souris l'emportèrent
et se retirèrent toutes du champ de bataille.
Casse-Noisette vint vers Marie pour la remercier.
- "Tu m'as sauvé la vie! Je ne sais comment te remercier!"
En disant cela il prenait vie et peu à peu se transformait en un magnifique
jeune homme. Marie n'en croyait pas ses yeux.
- "Viens avec moi, lui dit-il, je vais t'offrir une belle promenade là où
tu n'es encore jamais allée."
Et, comme par magie, les voilà emportés dans un tourbillon de flocons de neige.
Dans leur valse folle ils voyagèrent dans les airs et se retrouvèrent devant la
fée Dragée qui leur dit de sa douce voix : - "Ah! vous voilà enfin! Je
vous attendais pour le goûter. Venez vite jusqu'au royaume des gourmandises, au
fabuleux pays des friandises.
Le paysage était féerique : les chemins étaient en caramel, les fontaines
prodiguaient des jets de grenadine, il y avait des maisons en nougat, des
escaliers en biscuit, jusqu'au palais de la fée tout en choux à la crème, se
dressant comme une immense pièce montée.
- Comme je suis contente de vous voir, continuait la fée Dragée. Votre voyage
s'est bien passé?
- Oui, répondit Casse-Noisette, mais auparavant nous avons dû affronter l'armée
des souris et, sans Marie, je crois bien que je serais mort à l'heure qu'il
est.
Marie sourit, fière, d'avoir pu aider ce vaillant et beau garçon qui lui tenait
la main.
- Allez, installez-vous, poursuivit la fée Dragée. Vous allez goûter en
assistant au plus beau spectacle que je puisse vous offrir.
La belle fée conduisit alors les deux enfants vers une table magnifique où se
dressait un gigantesque goûter. elle leur offrit de délicieux et succulents
gâteaux accompagnés de boissons fraîches et chaudes dans une vaisselle
étincelante.
Puis d'un coup de baguette magique, elle appela les artistes qui apparaissaient
devant les yeux ébahis de Marie.
Le premier numéro était celui du Prince Chocolat qui exécuta une danse
espagnole endiablée durant laquelle il frappait des pieds pour mieux en
souligner le rythme ensorcelant.
Vint ensuite le café d'Arabie qui semblait flotter au dessus du sol comme un
doux arôme qui faisait frémir les narines des enfants. Ce fut alors le moment
du thé de Chine. Il bouillonnait en tournant comme un manège saluant à chacun
de ses tours les enfants en joie.
S'élancèrent alors les courageux et intrépides petits bonbons russes à la
menthe qui avaient préparé d'incroyables cascades et culbutes, puis un groupe
de quelques danseuses en massepain qui apportèrent une touche légère et
gracieuse à cette folle débandade.
Marie et Casse-Noisette
applaudissaient de tout leur coeur.
Madame Gingembre vint prendre place sur scène avec une flopée d'enfants tous
plus mignons les uns que les autres. Ils se lancèrent dans une époustouflante
série de galipettes entrecoupées de rires qui fusaient de toute part.
Dans le calme qui suivit leur départ, une cascade de fleurs en sucre déferla
dans la pièce. Elles ouvraient leurs pétales dorés en vagues successives,
traversaient la pièce avec grâce et élaboraient d'élégantes compositions avant
de se rejoindre toutes ensemble dans un magnifique bouquet final.
Après cette valse de fleurs, la fée Dragée refit son apparition, escortée d'un
tout jeune homme. L'élégance et la grâce de leurs silhouettes donnaient à leur
danse l'allure d'un tendre tête-à-tête. - "Voilà comment je voudrais être
quand je serai grande, se dit Marie en son for intérieur. Et je voudrais que
toutes les fêtes soient aussi joyeuses et belles que celle-ci".
Marie descendit de son trône, embrassa la fée Dragée et remercia tous les
danseurs. Puis elle prit la main de son prince et tous deux s'éloignèrent vers
le futur.
Lorsque Marie ouvrit les
yeux, elle était dans son lit. Casse-Noisette, son petit bonhomme en bois,
était là, à ses côtés, le mouchoir autour de la tête. Marie ne savait plus trop
quoi penser. Elle le regarda, dénoua le mouchoir et constata que la mâchoire
s'était, comme par miracle, réparée. Elle ne savait vraiment plus du tout quoi
penser.
On frappa alors à la
porte.
- Entrez! claironna Marie!
Apparurent alors dans l'embrasure de la porte l'oncle Drosselmeyer et son
neveu! Son neveu en chair et en os, en tout point identique au jeune homme du
rêve de Marie.
D'un pas lent et solennel il se dirigea vers Marie et lui donna la main afin
qu'elle descende de son lit.
Décidément à Noël tout
est vraiment possible
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