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Crèches de Noël, comment remettre l'église au milieu du villageLa polémique sur les crèches de Noël en dit long sur l'état de délabrement spirituel, moral et philosophique de la France. Tout cela au nom de la laïcité !Parce que la France change, il
y a désormais des polémiques, au mois de décembre, sur les crèches de
Noël, qui pourraient se trouver à certains endroits et pas à d'autres
où leur présence contreviendrait à la législation qui fait de notre
pays une République laïque. Qu'il soit fait défense aux mairies de
marquer un rattachement à la religion catholique, c'est sans doute
compréhensible, car les administrés d'une autre confession peuvent
légitimement se sentir exclus de la collectivité.
Faut-il pour autant que des
associations se fendent de saisines du juge, et que ce dernier oblige
les collectivités récalcitrantes à débarrasser leurs planchers de
décorations qui servent surtout à mettre un peu de chaleur dans les
austères espaces de notre froide administration ? Les socialistes ont
interdit, pour l'année prochaine, que l'on fasse du feu dans les
cheminées d'Ile-de-France, au nom de la lutte contre la pollution,
maintenant, ils interdisent les décorations de Noël au nom de la
laïcité : qu'est-ce que ce sera la prochaine fois ? Les cadeaux aux
enfants, au nom de l'égalité ?
Des interdisants maniaquesQue cela plaise ou non aux
interdisants maniaques, cela fait deux mille ans que la France est une
terre chrétienne. Cela ne veut pas dire qu'elle ne peut pas accueillir
d'autres religions, ni qu'elle doit s'enfermer dans son histoire,
s'immobiliser dans des coutumes désuètes. Cela signifie qu'elle est
quelque chose. Je vois d'ici la proposition, qu'on entretienne
celles-ci sur des fonds publics, que France 2 et France Culture
diffusent la messe le dimanche, et ainsi de suite.
On pourra aussi, certains le
suggèrent déjà, changer tous les jours fériés, voire, pourquoi pas, la
façon dont nous datons le temps, puisque nous écrivons partout que nous
sommes en 2014 après Jésus-Christ ! Quelle odieuse référence à la
chrétienté !
Quand les cloches des églises sonnent, c'est le pays qui chanteOn s'interroge sur les raisons
qui conduisent de jeunes gens nés en France, ayant reçu une éducation
convenable, été élevés dans des familles normales, disposant de
nombreuses possibilités pour leur avenir, à "partir faire le djihad".
Comme l'explique Régis Debray dans son dernier essai (L'Erreur de
calcul, éditions du Cerf), de nombreux hommes ont besoin d'autre chose
que de biens, d'argent ou d'engagements associatifs dégoulinants de
vertu. De nombreux hommes ne peuvent pas vivre dans un pays qui serait
devenu une entreprise, une compagnie d'assurances, un parc
d'attractions. Il leur faut autre chose. Des symboles, des idées, des
concepts, n'importe quoi qui les porte au-delà des petits objets qu'on
peut saisir, vendre et détruire.
Quand les cloches des églises font entendre leur musique dans les villes et les campagnes de France, c'est le pays lui-même qui chante, c'est son passé et son avenir à la fois, c'est le caractère perpétuel de la France comme nation et comme peuple, c'est tout cela qui survit aux générations. Quand ces cloches sonnent, c'est aussi l'idée de Dieu qui se manifeste, qui se rappelle aux hommes. Ceux-ci ont besoin de sentir cela, de trouver un contact avec l'invisible, ce qu'ils sentent exister entre les murs, entre les arbres, entre leurs souvenirs, cette vibration lumineuse qui parcourt la surface des mers. À force de faire table rase de son passé, la France va faire table rase de son avenir, d'elle-même : elle ne sera plus rien d'autre qu'une administration laïque mais creuse, inapte à nourrir un roman national. S'il n'y a plus ni patriotes ni croyants, il y aura des consommateurs, et ceux à qui cela ne suffira pas iront chercher leur destin ailleurs. |
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